Ecoutant avec attention les bruits dans le couloir, je n’avais pas remarqué la présence dans la cabine, jusqu’à ce qu’une voix retentisse derrière moi. Me retournant vivement, je me plaça immédiatement sur mes gardes en voyant la jeune femme avec son stylo à la main. Si elle pensait me faire peur ainsi, elle avait tord mais bon, j’avais remarqué le comportement bizarre de certaines personnes et je me doutais de la raison de sa méfiance. Levant les mains pour essayer de lui montrer que je n’étais pas dangereuse, je lui adressai un sourire.

Oh excusez-moi, je ne savais pas que cette pièce était occupée. Vous pourriez peut-être rappeler la sécurité et dire que c’était une erreur non ? Parce que je vais simplement ressortir de cette pièce et rejoindre ma propre chambre et notre rencontre ne sera qu’un souvenir lointain.

Waouh ! Bah ça c’était de la discussion ! Même Malcolm aurait été surpris de m’entendre autant parler. En principe j’agissais ou j’analysais mais rarement je parlais de longues minutes. Mes termes étaient souvent francs et secs mais là je sentais qu’il fallait que je me mette la jeune femme dans ma poche si je ne voulais pas avoir de soucis.

Je sais pas si vous avez remarqué mais … Il y a des passagers qui ont des comportements très bizarres et … j’ai du me cacher pour en éviter un. Si vous voulez vraiment que je quitte cette pièce, je le ferais même si je risque de me retrouver face à lui …

Je tentais de l’amadouer, de lui faire croire que j’avais peur de cet homme et que j’étais une femme un peu trouillarde. Tout mon contraire mais ça elle ne pouvait pas le savoir. Tout comme elle ne savait pas qu’en à peine quelques gestes j’aurais pu la désarmer et la maitriser mais bon ce n’était pas mon but …

Tanae laissa l'inconnue déballer ses explications en la dévisageant. Elle ne bavait pas comme les quelques passagers qui vous sautez dessus sans prévenir, cétait déjà ça. Et apparemment c'est l'un de ces énergumènes que la jeune femme voulait éviter. Mais pourquoi se cacher ? Il y avait d'autres options que d'entrer dans le première cabine venue. Tanae trouvait ça un peu suspect.

« Oh oui, j'ai bien remarqué que certains avaient des manières étranges, répondit-elle en fixant bien droit dans les yeux son interlocutrice. Ce que vous faites, ça ne me regarde pas. Tout ce que je veux, c'est que vous quittiez ma cabine ! Et si vous avez peur de vous faire mordre, eh bien la sécurité pourra vous escorter. Elle est là pour ça. »
Tanae avait du mal à comprendre pourquoi la femme n'était pas directement allée prévenir la sécurité d'ailleurs. Ne serait-ce que les contacter via un des terminaux pour les alerter d'un passager dangereux...
Sur quoi, on frappa à la porte.
« D'ailleurs... »
Tanae, sans lâcher son stylo, se dirigea vers l'entrée d'où elle poussa gentiment l'inconnue pour ouvrir la porte.
Deux types qui n'avaient pas l'air commode se tenaient dans l'encadrement.
« Madame ? Vous avez appelé ?
- Oui, si vous voulez bien raccompagner cette passagère. Quelqu'un est à ses trousses apparemment et elle a décidé de se cacher dans ma cabine... », expliqua l'employée en désignant l'intruse.
C'était suffisant pour les gardes qui s'approchèrent de Zoé.
« Veuillez nous suivre, on vous ramène dans la grande salle. »
Les deux costauds entourèrent la jeune femme et, à en juger par les marques sur le bras de l'un d'eux, ils étaient parés pour faire face aux invités agressifs.

En faite, je n’ai pas eu le temps de prévenir la sécurité qu’il était à ma poursuite mais bon oui, je vais quitter votre cabine, excusez-moi encore de cette intrusion …

Merde …Grimaçant légèrement en entendant les quelques coups frappés sur la porte, je me mis à sourire aux deux gardes en les regardant s’approcher de moi. Il ne me fallut que quelques secondes pour juger ma situation. Vu la taille des mecs et malgré le fait que je sache me battre, je doutais de pouvoir leur échapper. Et puis de toute façon, ça serait pour aller où ? Nous étions dans l’espace donc impossible de partir loin de là. Quoique … il doive bien y avoir des navettes … Oh … c’était une chose à vérifier tiens !

Merci à vous de bien vouloir m’aider. Certains passagers semblent comme … fous. Vous pensez que ça vient de quoi ? D’un truc qu’ils ont mangé ? Parce que moi j’aimerais éviter de poursuivre les gens à travers le vaisseau …

Je faisais mon possible pour passer pour une pauvre jeune femme faible et désemparée, même si ça m’exaspérait de faire ça. Wash se serait bien moqué de moi d’ailleurs !

A courir ainsi dans les couloirs, je ne sais même plus dans quelle direction est la grande salle. Il fait dire que c’est grand !

La grande salle … Ca c’était parfait, de là je pourrais partir à nouveau déambuler dans les couloirs pour éviter l’infirmerie et ainsi loupé la vaccination du jour.

Tanae était bien soulagée de voir l'inconnue partir de sa cabine. Les deux gardes de la sécurité s'occuperaient d'elle comme il se devait. Et justement, les deux types escortèrent la jeune femme qui s'était égarée sur le mauvais pont. Ils lui avaient dit la ramener à la grande salle, mais ils n'avaient pas précisé qu'ils feraient un détour par l'infirmerie la plus proche.
Avec les ''incidents'' récents, tout les membres de la sécurité, ainsi que le personnel de bord, avaient reçu l'ordre d'emmener les passagers suspects aux postes médicaux, ne serait-ce que pour vérifier leur état. Voire les mettre à l'isolement pour les cas les plus graves. Et par ''suspect'', le jugement était parfois un peu à la tête du client.
Comme la demoiselle perdue, qui paraissait aux deux gardes bien étrange à s'être promenée sur un pont loin de celui des invités, avec son histoire de passager à sa poursuite et à poser des questions. Rien que le premier point, de toute façon, la rendait coupable aux yeux des deux gars.

Arrivés à l'infirmerie -les gardes avaient bien fait attention à ce que la fille les suivent sans s'échapper-, les molosses expliquèrent rapidement la situation au médecin avant de se positionner devant la porte pour empêcher toute sortie prématurée.
« Ah ah, ces deux là !, rigola le médecin en invitant la jeune femme à s’asseoir. Je suis navré de vous faire perdre votre temps avec ce détour, mais j'ai moi aussi reçu des ordres et dois faire une petite vérification. Vous serez libre dans quelques minutes ! »
Si elle coopérait. Mais quelles raisons aurait-elle de ne pas le faire ?
« Bien. Vous avez été vaccinée aujourd'hui ? », demanda l'homme de science en se mettant devant le terminal de l'infirmerie.
Même si la femme mentait en répondant ''oui'', la prochaine question risquait de lui poser plus de problèmes.
« Je vais avoir besoin de vos nom et numéro de cabine. »

Me tenant chacun par un bras comme s’ils pensaient que j’allais me sauver, les deux montagnes sur pattes me ramenèrent … à l’infirmerie ! Grimaçant légèrement à l’idée que je n’avais pas de chance sur ce coup là, je leur lançai un regard rapide.

Hum … je doute que ce soit la grande salle ici …

Plantée encore eux, je ne pouvais que les suivre et leur obéir mais je n’avais pas dit mon dernier mot. Souriant au médecin, je m’assis calmement sur la chaise, comme si de rien était alors que mon cerveau cherchait une solution à ce problème. Je n’étais pas violente, enfin … juste quand il le fallait quoi, mais je doutais d’arriver à m’en sortir en douceur …

Bien évidemment que j’ai été vaccinée. C’était l’une de vos collègues. Une demoiselle fort aimable d’ailleurs !

Faisant la discussion comme si de rien était, je regardais autour de moi pour voir mes solutions de repli mais les deux gardes jouaient aux bons toutous en restant devant la porte à patienter sagement. La question suivante me fit hausser un sourcil. Merde j’avais oublié ça ! Qu’allais-je bien pouvoir répondre … Sachant que c’était perdu, je tentai le tout pour le tout …

Emma Chesterfield, chambre 123 …

Au pire si ça ne fonctionnait pas, je pourrais toujours prendre le médecin en otage pour sortir de la pièce mais pour aller où ? Ah oui les nacelles de secours ! Il devait bien y en avoir quelque part …

L'infirmier pianota sur le terminal pour trouver l'entrée correspondante à la cabine 123 d'Emma Chesterfield. Manque de bol, la cabine en question était occupée par un homme et nulle trace d'une mademoiselle Chesterfield dans la base de données. Levant un sourcil, l'infirmier dévisagea la patiente. Encore une qui voulait échapper à la piqûre. Ils se faisaient de plus en plus nombreux les passagers à refuser le traitement. De là à mentir, c'était la première fois qu'on faisait le coup à l'infirmier.
« Je vois », lâcha-t-il entre ses dents en ordonnant d'un signe de tête aux deux molosses de venir surveiller d'un peu plus près encore l'invitée.
« Vous n'êtes pas une grande adepte des vaccins, je me trompe ? Sinon quel est l'intérêt de mentir si ce n'est pour échapper à sa dose ? N'est-ce pas, Emma Chesterfield ? »
Un sourire malsain se dessina sur le visage de l'homme de science qui préparait l'injection, tandis que les deux gardes saisirent la jeune femme par les bras pour la maintenir en place.
Elle pourrait se débattre, hurler si cela lui faisait plaisir, l'infirmier la vaccinerait. Et ce fut fait. Puis les deux musclors relevèrent la demoiselle pour la conduire sans ménagement dans une petite pièce attenante à l'infirmerie ; une belle salle capitonnée dans laquelle la fille pourrait se reposer avant de recevoir la dose de vaccin du lendemain.
Décidément, se dit l'infirmier en jetant sa paire de gants, la cellule d'isolement est bien utile.

Spoiler:

Il ne me fallut pas longtemps pour voir que ça n’avait pas fonctionné. Me levant d’un bond en le voyant appeler les malabars, je me retrouvai bientôt prise entre leurs griffes pendant que l’infirmier s’occupait de me faire la piqure. Grimaçant en voyant que je ne pouvais m’échapper, je leurs lança un regard noir.

Je me fous bien de votre vaccin mais y’en a marre de ne pas savoir pour quoi il est précisément !
(Ouais quand y’en a marre, y’a des malabars dans le coin *sort*)

Je n’avais pas relevée pour le nom de toute façon, il n’aura qu’à chercher dans sa base de données qui n’avait pas été vacciné aujourd’hui et il saurait qui j’étais … Me laissant faire, je me retrouvai bientôt enfermée dans une salle qui avait été prévue pour les récalcitrants. A mon avis, je n’avais pas été la seule à la visiter mais un léger sourire me passa sur le visage alors que je me demandais si Malcolm était passé par là ou s’il avait été docile pour une fois. Enfin bref, au pire je lui demanderais demain, une fois que je serais sortie de là …

Spoiler: